24 avril 2016 | ||
18h30 | à | 19h30 |
LABYRINTHISIS (2007)
JACOB KIRKEGAARD (DAN)
Battements et autres sons différentiels
Planétarium / PT : 6 € ; TR : 3,50 €
La version originale de Labyrinthitis est un canon de tons produit par les otoémissions acoustiques des oreilles de Jacob Kirkegaard. Les otoémissions sont les sons subsoniques issus de l’oreille et spécifiques à chaque individu, sortes d’empreintes digitales de l’oreille. Avec Labyrinthitis (2007), interprété avec des instruments classiques, l’intention de cette transformation est d’explorer la dimension musicale et le potentiel des sons qui ont été utilisés dans la création du travail original. Le danois Jacob Kirkegaard est l’un des 16 artistes qui ont exposé à New York pour « Soundings », la première exposition d’art sonore du Mo MA.
En coproduction avec le Bon Accueil, lieu d’art sonore à Rennes
Biographie
Jacob Kirkegaard (né en 1975 au Danemark) est un artiste et explorateur de sons. Il s’intéresse à la résonance, au temps et à l’écoute avec une approche tant esthétique que scientifique.
En 2005, il obtient son diplôme à l’Academy for Media Arts de Cologne.
Parallèlement à ses études, il donne des conférences sur le son et l’espace à l’Académie Royale d’Architecture et à l’Art Academy de Copenhague.
Outre les universitaires, Jacob Kirkegaard collabore avec divers artistes (JG Thirlwell, Ann Lislegaard, Lydia Lunch, CM von Hausswolff, Philip Jeck, BJ Nilsen,…) sur les installations sonores et les résonances, réalisant de nombreux travaux en Asie, en Amérique et en Europe.
Il axe ses recherches sur l’in situ, dans le potentiel caché dans la musicalité des couches sonores de l’environnement. Dans ce contexte, il aime à capturer, explorer les sons, comme la terre volcanique, la glace, les phénomènes atmosphériques, les centrales nucléaires et les lieux désertés par l’Homme. Il utilise pour ses enregistrement des accéléromètres, des hydrophones et construit ses propres récepteurs électromagnétiques.
Jacob Kirkegaard a sorti 5 cinq albums solo, la plupart sur le prestigieux label Touch.
Il vit et travaille à Berlin (Allemagne) et au Danemark.
Discographie
- (1998) Luftantenner – in the band Æter (Helicopter Records)
- (2002) Soaked – with Philip Jeck Touch
- (2003) 01.02 (Bottrop-boy)
- (2005) Eldfjall Touch
- (2006) Four Rooms Touch
- (2008) Labyrinthitis Touch
- (2011) Kirstein* / Kirkegaard* – Imperia
- (2013) Else Marie Pade + Jacob Kirkegaard – Svævninger
- (2013) Conversion (LP) Touch
- (2014) Live In Tilburg (Part I & II) (Cass, MiniAlbum, Ltd, C26)
- (2014) 40 Days Of Silence (LP, Album, Ltd) Von
- (2015) Arc (LP, Album, Ltd) Holotype Editions
- (2015) 5 Pieces (3xCass, Ltd, C60) Posh Isolation
Présentation de Labyrinthitis
Jacob Kirkegaard, un des actuels maîtres du field-recording, poursuit avec « Labyrinthitis » ses recherches en s’intéressant cette fois de près au fonctionnement interne de l’oreille, et plus particulièrement au rapport que l’organe entretient avec le monde extérieur.
Kirkegaard a pris comme point de départ de ses recherches une théorie émise il y a plusieurs siècles par le compositeur italien Giuseppe Tartini (1692-1770), selon laquelle l’oreille réagit à ce qu’elle entend en émettant à son tour. Il découvrit en effet par hasard, en accordant son violon, que deux cordes jouées à un certain ratio provoquaient l’apparition d’un troisième son, ce dernier n’étant cependant ni une somme ni une synthèse de la paire précédente, mais une tonalité « indépendante ».
On ne réussit évidemment que beaucoup plus tard à comprendre exactement le phénomène : lorsque deux tonalités entrent dans la cochlée, ses « poils » se mettent à vibrer, modifiant leur perception par notre cerveau. En somme, l’oreille produit un son de la même manière qu’un instrument, pouvant être enregistré à l’aide de microphones, puis amplifié pour être écouté.
Labyrinthitis est une composition qui est créée entièrement de sons produits dans l’oreille interne de l’artiste, qui provoquent à leur tour des émissions audibles dans les oreilles du public.
De manière surprenante – nos oreilles entendent non seulement des sons, mais elles en créent aussi. Inspiré par une technique médicale, elle a été testée pour la surdité des nouveau-nés. La performance de Jacob Kirkegaard utilise des sons enregistrés à partir de de ses propres oreilles, qui quand ils sont écouté, produisent des tons spécifiques dans les oreilles de l’auditeur. Les tonalités spécifiques de l’oreille de Kirkegaard – joué à des fréquences spécifiques et des ratios précis – causeront des changements physiologiques dans les oreilles des auditeurs, produisant ainsi un troisième ton – une otoémissions acoustiques qui est également aussi mentionné en musicologie comme « le ton de Tartini » en référence au compositeur italien.
Les oto-émissions acoustiques sont le reflet d’une activité spontanée de l’oreille qui va non seulement entendre des sons mais également en produire, en réponse à une stimulation sonore extérieure notamment. Ces OEA (otoémissions acoustiques) peuvent donc être définies comme des sons émis par l’oreille. La genèse de ces OEA repose sur la normalité du fonctionnement des cellules ciliées externes de l’organe de Corti (l’organe de la perception auditive). Il existe aussi des sons émis spontanément par l’oreille nommés OEA spontanées, tandis que les autres s’appellent OEA provoquées transitoires.
Autre phénomène remarqué lors de ces séances de groupe : les vibrations se déplacent dans le corps entier, comme un flux électrique ou, plus prosaïquement, un énorme frisson. Evidemment, l’expérience n’est pas complète sans un appareil relativement sophistiqué et des conditions optimales, mais une écoute, attentive ou non, permet de découvrir par soi-même la manière dont nos organes auditifs fonctionnent et interagissent avec le cerveau et le corps, provoquant autant de perplexité que d’intérêt.
Intéressant, ludique, étrange et instructif, « Labyrinthitis » est plus qu’une oeuvre contemporaine, une étude scientifique ou un disque ambient, à quoi il ressemble souvent : il s’agit d’une expérience à part entière, à laquelle chacun devrait participer au moins une fois dans sa vie.
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